Cochon d'Inde


Le harcèlement scolaire, ça existait avant Facebook ! Récemment, j'ai été recontacté par une camarade de la fac. Une fille qui couchait avec tout le monde, du moins, le pensais-je... Et elle n'était même pas au courant de cette réputation.

Ah, la fac... C'est un moment particulier, où on n'est plus des enfants, ni des adolescents, mais où l'on n'est pas encore des adultes... Quand j'avais 19 ans, j'étais le ringard de service. Je faisais des trucs de ringards comme aller aux cours (même ceux qui débutaient à 8h), faire les devoirs, rendre en temps et en heure les dossiers, écouter en amphi et même réviser avant les partiels ! Ce qui me sauvait, c'est que j'avais appris à faire un cocktail alors méconnu en France, le mojito. Et même aujourd'hui, je pense que mon mojito est dans le top 5 français. Du coup, on m'invitait aux soirées pour faire le barman. Et comme j'étais le ringard de service, les gens, y compris les filles, faisaient comme si je n'étais pas là. Donc j'étais au courant de (presque) tout ce qui se tramait...
A la fac, j'avais flashé sur "cochon d'Inde". Les autres filles la surnommait comme ça à cause de ses bonne joues. Avec ses lunettes à grosse monture, elle faisait un peu intello. Je pensais que j'avais trouvé mon équivalent féminin... Sauf que pour "cochon d'Inde", je n'existais pas ! Elle visait plus haut... Comme Fa, un gars qui était en année supérieure. Elle a cherché à lui mettre le grappin dessus lors du week-end d'intégration ("wei", pour les intimes.) Puis elle a découvert que Fa avait déjà une copine et qu'il cherchait juste à tremper le biscuit. Ca en est resté là, sauf qu'ensuite, Fa a livré une autre version de l'histoire. Il s'est tapé "cochon d'inde" après avoir trop bu et depuis, elle le colle.
Ensuite, elle a trainé avec Ch. Ch empruntait régulièrement la BMW de son père. "Cochon d'Inde" a cherché à le coller. Une fois, avec Ma et le frère de Ch, ils sont partis ensemble dans un cabaret, à Paris. Peu de temps après, j'avais un dossier de gestion financière à faire avec Ch, Ph, Fl (une fille) et Is (une autre fille.) Ch avait choisi le lieu où on devait définir qui faisait quoi. Ch nous a surtout parlé de sa viré parisienne, de comment son grand-frère s'est tapé "cochon d'Inde" et comment, ensuite, elle lui avait laissé une dizaine de messages sur son répondeur. Comme avec Fa. Fl s'est écriée "la pute !" Et à partir de là, pour les autres filles, "cochon d'Inde" était exclusivement désignée par "la pute".
Pourquoi tant de haine ? A la fac, il y avait tout le temps des soirées. Qu'il s'agisse d'élèves qui faisaient une fête chez eux ou de soirées ouvertes à (presque) tous les élèves de la promo. En tout cas, à chaque fois, les gens disaient tout de suite "on invite "cochon d'Inde"!" Alors forcément, les filles plus quelconques étaient jalouses. Fl aurait bien voulu être aussi incontournable. Ka était jalouse de la vie sexuelle supposée de "cochon d'Inde". Quant à Co et à So, elles la trouvaient immorale. Toutes les quatre ne pouvaient pas se supporter. Mais elles s'unirent contre leur ennemie commune.
Et on n'en était que deux mois après le début des cours ! Le pire, c'est que Ch et "cochon d'Inde" se voyaient souvent en dehors des cours. Elle m'a dit que c'était son meilleur ami masculin... Sauf que dans son dos, Ch racontait à tout le monde comment son frère l'avait déglinguée et comment c'était une grosse conne, que l'on pouvait facilement mettre dans son lit...
Ca, Mo l'avait reçu 5 sur 5... Il est donc allé voir "cochon d'Inde". Ils sont sorti ensemble et il a commencé à se montrer pressant. Elle l'a envoyé dans les roses. Pour sauver la face, "Mo" a raconté que lui aussi, il avait couché avec "cochon d'Inde" et pour une fois, elle était au courant.
Le pire, c'est qu'en vrai, "cochon d'Inde" se gardait pour "le" garçon. Elle n'avait aucune idée de pourquoi les mecs la regardait avec concupiscence et pourquoi les filles étaient aussi méchantes avec elle. Une fois, en amphi, elle fixa Ol. Or, Ol avait une copine et de grands principes. Il lui rendit donc un regard dégouté : "Qu'est-ce qu'elle a, cette trainée ?" Une autre fois, on était près des machines à café avec Di, Sy, Fl, "cochon d'Inde" et Sa. Sy était une fille un peu gothique. Quand on lui a dit qu'on avait tous des surnoms, elle a dit, avec un air autoflagellation : "D'habitude, on m'appelle "la pute"." Fl répondit du tac-au-tac : "C'est déjà pris !" Ce n'est qu'il y a quelques jours que "cochon d'Inde" a compris la signification de ces deux épisodes... Et le pire, c'est que moi, du coup, je passais pour le dernier des cons ! A en croire la rumeur, "cochon d'Inde" avait le feu aux fesses. Toute la licence lui était passée dessus ! Et moi, j'étais le seul mec à qui elle avait dit "non" !

Et donc, à cause de Fa et Ch, deux mythomanes, "cochon d'Inde" et de la jalousie féminine, elle a vécu une année infernale. Elle n'avait presque pas d'amie et les mecs avec qui elle sortait voulaient coucher d'emblée. Les quatre filles avaient réussi leur plan machiavélique : dès le début du second semestre, "cochon d'Inde" était une paria. On ne l'invitait plus, même dans les soirées théoriquement ouvertes à tous les étudiants.
L'histoire vous semblera familière. Peut-être même que derrière Fa ou Fl, vous reconnaitrez d'anciens camarades de classe. Tout simplement car des filles comme "Cochon d'Inde", victimes de la jalousie, il y en a des centaines, voire des milliers, chaque année... Et nul doute qu'aujourd'hui, avec les réseaux sociaux, son "mur" serait plein de gentillesses et de dick pics... Alors, mon conseil pour les étudiants : méfiez-vous des "on-dits". A colporter des rumeurs, vous pouvez détruire des gens. Et les filles, évitez de sortir avec les "mecs cools" : ils ne pensent qu'à eux et en cas de pépin, tout le monde prendra leur défense.

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