50 nuances d'Ikea

Samedi dernier, comme beaucoup de Français, j'étais chez Ikea.

En soit, Ikea, c'est le dernier endroit où l'on s'entendrait à trouver quoi que ce soit d'érotique. C'est le temple du "tout public". C'est un endroit "où les enfants sont rois" (dixit la présentation officielle du magasin.) D'où un aspect très ludique. Accessoirement, Ikea, c'est Suédois. Par définition, les nuits y sont longues, l'hiver. Donc vous voulez des couleurs claires et de la luminosité pour capter le moindre rayon de soleil.
La chambre rouge
Mais au détour du show-room, me voilà dans une chambre pas du tout "Ikea". Un alcôve très sombre. Un espace fermé par des rideaux rouges, aux murs noirs. Un lit trône littéralement au milieu de la pièce.
Clairement, ce n'est pas une chambre pour dormir, mais une chambre destinée à la volupté, comme on disait autrefois...

Par rapport à la photo sur Facebook, les draps sont désormais rouge, les poufs sont noirs et il y a davantage de coussins. De plus, la plante verte et le miroir ont été retirés. Il n'y a plus que du rouge et du noir.
"C'est quoi ce truc ? C'est la chambre de Christian Grey ?!" Sur le site de 50 Nuances de Grey, on peut visiter l'appartement du héros. Y compris sa "chambre rouge", alias la "salle de jeux"...
Du rouge, du noir, un lit au centre de la pièce... Bien sûr, chez Ikea, pas question d'afficher des sex-toys et des cravaches au mur.

La page Facebook fait néanmoins une allusion coquine. Grin grin, wink wink, nudge nudge, say no more?
50 nuances de misogynie
Cela fait quelques années que les médias n'évoquent plus 50 nuances de Grey. Le gros des articles date de 2015-2017.

Il faut dire que c'était une triptyque de livres pas terribles, qui ont donné des films très oubliables. Entre deux scènes de sexe, on s'ennuie ferme. Le style d'écriture est indigent et à l'écran, les acteurs n'ont aucun charisme.
D'ordinaire, la presse bobo aime bien les films de genre anglo-saxons. 50 Nuances de Grey fait parti de la pop-culture. Pour une fois, le terme "culte" n'est pas galvaudé.

Seulement voilà, la presse y voit un véritable plaidoyer viriliste. De nos jours, c'est un véritable crime. Alors, au lieu de critiquer la paresse du scénario ou la platitude de la mise en scène, ils s'en prennent au machisme supposé des films :
Effectivement, Christian Grey, le personnage principal est un égocentrique et un égoïste. Seul compte son propre plaisir. Il collectionne les femmes et le dirige, de même qu'il possède plusieurs véhicules et plusieurs sociétés. Il est aussi cynique en amours, qu'en affaires.

Lorsqu'il prend Anastasia, il ne la tient pas par la taille. Il la prend par le cou, comme s'il la tenait en laisse :
Et elle, au lieu de s'éloigner, elle en redemande ! Fais moi mal, Johnny ! Elle s'excuse même d'être vierge. Et telle une héroïne de roman du XIXe siècle, Anastasia finit par épouser son homme. Quand bien même il est pervers (au sens non-érotique du terme) et manipulateur.

D'ailleurs, lors du mariage, il continue de la tenir par le cou.
C'est comme si Michel Houellebecq écrivait un roman à l'eau de rose !

Sauf qu'il a été écrit par un femme, Erika Leonard James. La réalisatrice de 50 Nuances de Grey est également une femme, Sam Taylor-Jonhson. Et même la scénariste du film est une femme, Kelly Marcel.
Les SJW ont beau s'époumoner sur le caractère machiste, ils buttent sur un os : c'est un film de femmes.
Un succès malgré tout
L'autre point qui irrite les féministes, c'est que c'est un carton. On parle de 100 millions d'exemplaires vendus. Les deux tiers des lecteurs sont des lectrices.


En France, la page Amazon est édifiante. Chaque ouvrage est noté à plus de quatre étoiles, avec un millier de notations. C'est un engagement inédit. A titre de comparaison, Guillaume Musso, le plus vendu des auteurs Français, n'a que deux cents notations en moyenne.
Grey, le quatrième et dernier opus, présente l'histoire sous l'angle du protagoniste masculin. On est un cran au-dessus en terme de machisme et d'égocentrisme.

Pourtant, c'est un carton. En France, Grey explose les records de pré-commande. Jean-Claude Lattès, l'éditeur, fait un tirage de tête de 550 000 exemplaires. A peine arrivé en librairie, en décembre 2017, c'est la deuxième meilleure vente française.
Lattès, un proche de Bernard Pivot, s'éteint en janvier 2018, avec un sacré magot.

Choc du réelLes SJW sont contre la pornographie et l'érotisme. Elles promeuvent une sexualité "féminine". L'égalité femme-homme, même au lit ! C'est position du missionnaire, le samedi soir, lumières éteintes. Si possible, la fille doit être "queer", "racisée" et être "en harmonie avec son corps" (NDLA : autrement dit, elle est obèse.)
L'homme, lui, il doit être déconstruit. Un végan qui ne doit se coucher sur sa bien-aimée qu'après son consentement explicite et répété. Si c'est un blanc, il doit comprendre qu'il a suffisamment utilisé son "privilège blanc" dans l'histoire et qu'il doit laisser la place aux autres...

Mais dans les faits, cet homme-là, cette sexualité-là, personne n'en veut. Y compris les femmes. Les faits sont têtus. Elles mouillent devant Christian Grey, l'antithèse de l'homme "commerce équitable-développement durable". C'est un carnassier. D'ailleurs, au tout début du second opus, il mange un steak !

Les lectrices et les spectatrices de 50 Nuances de Grey, on ne leur a pas mis un pistolet sur la tempe ! Même 20 Minutes a tenté de les dissuader. Et pourtant, elles redemandent du Christian Grey.
Que font les SJW lorsque les faits s'entêtent à leur donner tort ? Ils détournent le regard. Depuis 2017, c'est donc le black-out sur 50 Nuances de Grey.

Mais non seulement les femmes adorent ce livre et ce film, mais elles veulent le vivre en vrai ! Decathlon s'est amusé de voir que ses ventes de cravaches explose :
Donc Ikea surfe à son tour sur la vague, avec sa version de la "chambre rouge" :
Pour info, cet Ikea a également reproduit le dressing de Christian Grey. Simplement, la banquette centrale a été remplacée par un vrai lit :

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