On the prowl (1989)

Dans le porno, les années 80 furent marquées par l'apparition des caméras vidéos. Les premiers films étaient peu ou proue identiques à ce qui étaient tournés auparavant, mais en vidéo. Mais avec la baisse des coûts, on pouvait tourner des films avec une diffusion a priori plus réduite. En Europe, cela donna la vague "hard crade". Aux Etats-Unis, ça donna le gonzo.

Jamie Gills fut l'un des pères du gonzo. Un peu acteur, un peu chauffeur de taxi, dans le New York des années 70, il opta pour une carrière d'acteur porno. Il ne cherchait pas les gros titres. Ca lui permettait de vivoter, de draguer tout ce qui bougeait (homme, femme et trans) tout en lui donnant de la contenance lors des soirées mondaines. En 1979, avec Dracula sucks, il devint acteur à temps plein.
A la fin des années 80, Duck Dumont lui souffla une idée : filmer une actrice couchant avec des inconnus et filmer cela. Après tout, certains hommes seraient près à tourner gratuitement ! Et en plus, les spectateurs adoreraient sûrement ce porno "sans filtre".

En 1989, Dumont et Gills louèrent une limousine. Le premier filmait et le second parlait face caméra, avec un micro. Renee Morgan était l'actrice en question. Une autre fille est présente, mais elle ne faisait rien. Le groupe roula dans San Francisco, jusqu'à ce qu'ils tombent sur deux marins. L'un d'eux n'arrive pas à avoir d'érection, l'autre, finit par se taper Renee Morgan.
A la fin, Dumont et Gilles avaient 60 minutes de rush et ils considéraient que c'était assez. Ca donna On the prowl (en chasse.)

Les deux marins furent congédiés pour avoir tourné dans un porno, puis réintégré. Cette polémique suffit pour faire de la pub à Gills.

Il songea à une suite, puis à un troisième opus, puis à un quatrième, etc. Vivid diffusa les cassettes. L'acteur se mua producteur-réalisateur. Plus besoin de Dumont, ni de limousine, d'ailleurs. Bien sûr, l'actrice choisissait ses partenaires, mais le côté réaliste plaisait. Gills tourna de nouveau des On the Prowl à la fin des années 90.
Son héritier le plus fidèle, ce sont les films nanpa, au Japon. Ils en reprirent le côté brut et le fait que le sexe n'est pas systématique.
Ce genre de porno fut baptisé gonzo, par analogie avec le gonzo-journalisme d'Hunter S. Thompson.

Dans le film Boogie Nights, il y avait une scène où Burt Reynolds se filme aux côtés d'Heather Graham, dans une limousine avec l'objectif de trouver un acteur d'un soir. La scène était baptisée "On the lookout".
Gills la jugea sordide, pas du tout dans l'esprit festif du tournage d'On the prowl.
Gills n'était pas le seul à revendiquer la paternité du gonzo. C'était également en 1989 que John Stagliano tourna son premier Buttman. Lui aussi, il se vantait de peu couper lors du montage.

Et puis, il y avait Ed Powers. Un peu après On the Prowl, il tourna Bus stop tales. Powers abordait des filles a priori non-professionneles à des arrêts de bus, il les séduisait, elles le suivaient chez lui, où il couchait avec. Le tout, devant la caméra. Bien sûr, les filles étaient en fait des actrices porno débutantes.
Le concept de séduire des filles dans la rue et de les ramener pour coucher fut repris par le Bang Bus. Sans oublier toutes les productions Manwin (Captain Stabbin, We live together, Big saussage pizza, Tranny surprise, etc.)
Peu après, une actrice, Mia Powers supplia Gills de lui donner une scène, afin de lancer sa carrière. Après un vague casting, Gills se la tapait, devant la caméra de Dumont, en vision subjective. Powers proposa de faire d'autres scènes, avec d'autres actrices. Dumont quitta le navire.
L'ensemble des scènes furent regroupées dans une cassette, Dirty Debutantes. Powers et Gills se nommant les Nasty Brothers. Bientôt, le duo tourna des Dirty Debutantes à la chaine. Powers s'occupait seul de la production.
En 1991, Gills l'accusa de ne pas assez le payer. L'affaire se termina devant les tribunaux, en 1999. L'acteur n'avait aucune preuve de sa bonne foi et le juge donna raison à Powers. Il garda les droits des Dirty Debutantes et effaça le nom de son ex-partenaire des jaquettes.

Gills mourut d'un cancer en 2010. Powers est toujours là, mais il n'a pas pris le virage des cassettes, puis des DVD.
Là encore, le concept du "casting" d'une actrice débutante, où le casteur apparait peu, voire pas du tout, fit son chemin. On pense bien sûr à Pierre Woodman, à John B Root et à l'incontournable Backroom casting couch.

Ainsi, presque tous les sites de gonzo actuels doivent beaucoup à deux hommes oubliés, Jamie Gills et Ed Powers.

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